FSQP

ACTUALITÉS :

STOP AUX VIOLENCES POLICIERES !

Ali Ziri, 69 ans, est mort le 11 juin 2009 suite à une interpellation par la police d’Argenteuil. Il était retraité, après avoir vécu 50 ans en France et travaillé 36 ans comme ouvrier dans la même entreprise.

Son ami, Arezki Kerfali, 61 ans et invalide à 60%, s’en est sorti avec une fracture au poignet et des hématomes sur tout le corps. Dans un premier temps, après une enquête bâclée menée entre autres par le commissariat de police lui-même, l’affaire a été juridiquement classée. Il aura fallu toute la détermination de leurs familles respectives ainsi que de leur avocat, du collectif « Justice et vérité pour Ali Ziri » avec la manifestation du 24 juin, pour que la vérité commence à éclater. La contre-expertise médicale a montré qu’Ali Ziri, menotté, a reçu plusieurs coups de la police. Il a été constaté 27 hématomes s’étendant jusqu’à 17 centimètres sur son corps et sa mort par anoxie (absence d’oxygène) en lien avec une asphyxie pulmonaire de type mécanique.

Plus aucun doute : Ali Ziri a été tué, et les trois policiers au moins impliqués dans sa mort sont toujours en fonction au commissariat d’Argenteuil.

Son corps est toujours retenu à la morgue 3 mois après, et sa famille ne peut faire son deuil qu’au rythme d’une justice toujours trop lente quand la police est en cause.

Jusqu’à quand l’impunité pour les auteurs de violences policières ?

Comme l’affaire Ziad et Bouna à Clichy-sous-Bois, l’affaire Mouchine et Larami à Villiers-le-Bel, comme l’affaire Hakim Ajimi mort par l’utilisation de la clef d‘étranglement (une pratique d’interpellation policière condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme), comme les affaires de tous ceux qui ont perdu un œil ou l’audition suite à des tirs de flash-balls : Dominique et Bruno à Villiers le bel, Joachim à Montreuil, Sékou aux Mureaux, Samir à Neuilly-sur-Marne... comme les affaires d’outrage à agent dont monsieur Arezki Kerfali, par exemple, est accusé et pour laquelle il doit comparaître au tribunal le 17 septembre, alors même que c’est lui qui a eu un arrêt de travail de 8 jours.

Toutes ces violences ne sont pas de simples bavures qui s’accumulent, elles sont le résultat de tout un système de répression, pensé et structuré qui s’attaque aux plus pauvres quel que soit leur âge, et tout particulièrement lorsqu’ils sont arabes ou noirs.

Face à ces violences policières, mettons un coup d’arrêt. Face à l’impunité, exigeons la justice.

Le courage, ce n’est pas tant de contenir la colère que de faire exploser la vérité. Notre colère ne pourra s’apaiser que dans la justice. Nous exigeons la suspension et la mise en examen des policiers impliqués.

Nous vous appelons à nous retrouver, trois mois après la mort de monsieur Ziri,

vendredi 11 septembre à 18 heures sur la dalle d’Argenteuil

(à côté de la gare du Val d’Argenteuil), où seront présentes d’autres victimes de violences policières, leurs familles et leurs avocats pour témoigner et exiger justice. Contact (ATMF), tél. : 01 39 82 81 48. Email : atmfargent@yahoo.fr Site : www.atmf.org

Les membres du collectif (premiers signataires) : ATMF, SDAE, AMABVO, CIVIC , Résistons Ensemble contre les violences policières, AC lefeu, MQJS, MIB, GISTI, FSQP, Les Résidents du Foyer les Remparts, AL 95, NPA, PCF, PG, PCOF, LO, Les verts, Etre de Gauche, CGT, Les proches et amis du défunt Ali Ziri…

Monsieur ALI ZIRI, mort après un contrôle policier.

Rassemblement le 11 Septembre à 18 h, sur la dalle d’Argenteuil.

18h30 : Témoignages des victimes, des avocats et interventions des associations.

20h30 : Repas solidaire, gratuit sera partagé.


Vérité et Justice pour Ali Ziri & Areski Kerfali

Les cendres de Papon n'ont pas été dispersées dans la mer mais les murs des commissariats en sont toujours imprégnés ce qui nous rappelle les pires heures d'octobre 1961.
C'est ce qu'on peut penser après la terrible rencontre d'Ali Ziri et d'Arezki Kerfali avec la police d'Argenteuil le mardi 9 juin vers 20h30 au croisement des boulevards Jeanne d'Arc et Léon Feix. Sommés de s'arrêter par une patrouille de police de trois policiers qui ordonnera aux occupants de la voiture de sortir. Ali voyant son ami se faire malmener par les forces de l'ordre tente de les calmer; en voyant qu'il avait à faire à un mur sourd Ali les menaça de déposer plainte contre eux. A ce moment leur avenir était scellé par l'inhumanité des forces de l'ordre. Les deux hommes et une femme décident d'appeler un fourgon de police et les deux chibanis menottés dans le dos sont jetés manu-militari dans le fourgon puis roués de coups. Arezki perdra connaissance et n'apprendra la mort de son ami que 11 juin après 24 heures de garde à vue.
Les policiers ont été blanchis dès les premières heures de l'affaire sans mêmes qu'une enquête sérieuse ne soit diligentée par la justice. Ces mêmes policiers qui sont à la base de cette bavure sont toujours en fonction dans les rues d'Argenteuil sans même qu'il soient suspendus le temps d'une enquête qui prouvera leur manque d'implication dans le décès d'Ali Ziri et des coups et blessures affligés à Arezki. Nous connaissons tous la machine propagandiste de la police et de ses syndicats, selon elle la mort de Ali Ziri est due à une malformation cardiaque. La police a toujours été maître en la manière pour étouffer les bavures et les crimes commis par ses agents et cette dramatique histoire sonne à nos oreilles comme du déjà entendu.
Comme l'affaire Ziad et Bouna à Clichy sous Bois, l'affaire Mushin et Larami à Villiers-le-Bel le Bel… Face à ces violences policières nous devons faire front commun avec le Collectif "Vérité et justice pour M.Ali Ziri " et la population d'Argenteuil pour exiger que dans un premier temps les policiers mis en cause dans l'interpellation de M Ziri et M Kerfali soient suspendus de leur fonction et que justice et vérité soit faite sur la mort d'Ali Ziri.

Le 11 septembre 2009 cela fera trois mois jour pour jour que M. Ali Ziri est mort, en cette occasion le collectif de soutien organise sur la dalle du Val d'Argenteuil, à 18heures, un rassemblement pour honorer cette mort et pour soutenir M. Kerfali qui lui est poursuivi en justice pour outrage à agent.


ENCORE DEUX POIDS DEUX MESURES

par Farid Taalba

Vendredi 3 avril 2009

Lettre ouverte à Monsieur le Ministre
Dans ce lycée professionnel du Val d’Oise « l’affaire de la double pénétration » suit son cours. Sous le coup d’une mesure de licenciement « sans préavis ni indemnité de rupture » à cause d’une altercation avec un enseignant, un surveillant, est entendu par le Proviseur qui lui délivre sa lettre de licenciement après lui avoir exprimé de nombreux compliments en présence d’une enseignante de français qui l’assistait au cours de cet entretien...
En attendant la décision du proviseur, les élèves avaient organisé une grève générale exceptionnelle qui s’était déroulée dans le calme. La décision du proviseur de licencier le jeune surveillant provoque une seconde action de protestation des élèves : un rassemblement à la grille du lycée avec distribution de tract ; texte lycéen qui dénonce une situation « d’injustice totale ». Les élèves écrivent : « (...) Notre surveillant a été licencié avec un motif bidon : soi-disant il a menacé de mort un professeur. Alors qu’on sait que ce professeur a l’habitude de provoquer. Notre surveillant est incapable de faire du mal. On l’a condamné comme s’il avait tué quelqu’un.

Mais quand ce professeur nous insulte en classe, quand il nous menace sur nos examens, quand il nous met la pression grave pour nous faire commettre une faute, quand on le dit au lycée malgré qu’on risque gros à parler, lui il n’a aucune sanction (...) »

Dès le lendemain, les pressions de l’administration, de certains enseignants, et des CPE, se multiplièrent sur les élèves. Objectif : les faire revenir sur leurs déclarations ; leur faire regretter ce rassemblement qui a eu lieu sans heurt et sans faute...
La mobilisation des enseignants fut moins unanime : cinq professeurs sur 42 seulement, cinq femmes, ont fait grève le lundi 23 mars pour protester contre « une politique à deux vitesses » dont ces jeunes dans ce coin de banlieue parisienne font les frais dans l’école. Elles écrivent ce jour-là au proviseur ainsi qu’à l’ensemble de la communauté éducative pour se désolidariser du comportement discriminatoire et harcelant de cet enseignant à l’égard des élèves en classe et pour dénoncer à leur tour les insultes à caractère raciste et sexuel qu’ils profèrent en direction de ses élèves en toute impunité. Ces cinq femmes posent en conclusion de leur lettre la question de savoir si « la communauté éducative se reconnaît dans ce représentant du personnel au conseil d’administration et au conseil de discipline »

Leur lettre restera sans réponse. Il semblerait que le comportement de l’enseignant ne choque guère la plupart des adultes de cet établissement...
Sans se décourager malgré ce contexte peu glorieux, une classe décide d’écrire une lettre ouverte, dont voici le texte signé par les élèves, au ministre de l’Education Nationale, Monsieur Xavier Darcos.
Farid Taalba

Monsieur le Ministre,
Avant les vacances de février 2009, nous, les élèves de Bac Pro, nous avons écrit une lettre au proviseur du lycée pour lui signaler que notre professeur avait parlé de « la double pénétration » devant toute la classe. Après les vacances de février 2009, nous avons appris que notre surveillant était menacé de licenciement à cause de ce Monsieur. A cette occasion, nous avons décidé d’écrire une nouvelle lettre au proviseur datée du 10 mars 2009, dans laquelle nous expliquons avec tous les détails la façon dont notre professeur nous fait souffrir en classe
.

Le proviseur n’a répondu à aucune de ces deux lettres ; il a fait comme si de rien n’était. En discutant avec d’autres élèves de cet enseignant, dans d’autres classes, nous avons appris qu’il avait avec eux le même comportement qu’avec nous. Eux aussi ont écrit des lettres au proviseur pour décrire les humiliations que ce Monsieur leur fait subir en classe. Nous avons aussi parlé à nos professeurs pour voir si ce comportement de cet enseignant était normal. La grande majorité de nos professeurs nous ont dit que ce n’était pas normal mais qu’ils ne pouvaient rien y faire. Même certains nous ont dit que ses paroles n’étaient pas si choquantes et que « le statut des professeurs leur permettait certaines choses ».
Sur 42 professeurs, seules 5 professeurs nous ont compris et soutenus. Notre proviseur nous a dit à propos de ces 5 professeurs sans les citer nommément qu’elles nous avaient manipulés et qu’elles nous avaient entrainés à faire une grève pour leurs comptes. Nous voulons redire que nous avons fait grève de nous-mêmes pour protester contre le licenciement de notre surveillant que nous trouvons toujours injuste. Et que si il y a un manipulateur dans l’histoire c’est le professeur et tous ceux qui le couvrent. Le jour de la grève du 17 mars 2009, nous étions fiers et heureux d’exprimer notre solidarité à notre surveillant.
Le proviseur a choisi de le licencier finalement.
Pour l’ensemble des élèves du lycée, cela a été un coup très dur. Cela voulait dire qu’aux yeux du proviseur, nous ne valons rien et que la grossièreté et l’injustice d’un professeur ne sera jamais sanctionné. Après nous avons encore protesté dans un rassemblement à la grille le mardi 24 mars 2009. Et encore une fois nous n’avons pas été entendus par le proviseur. Les Conseillères Principales d’Education n’ont pas arrêté de nous expliquer que nous étions manipulés par les 5 professeurs qui nous ont soutenus. Mais comment 5 professeurs ont pu manipuler la quasi-totalité des élèves présents ce jour-là, soit 200 élèves environ, qui ont signé la pétition de soutien au surveillant ?
Nous apprenons aujourd’hui que nos camarades de BEP ont dérapé en frappant un élève de leur classe car il les avait trahis en présence de l’enseignant et du proviseur. Nous ne sommes pas d’accord avec cette réaction mais c’est la faute à la situation qu’on laisse pourrir dans le lycée, qui nous laisse dans le vide, sans réponse, avec des pressions des CPE et de l’administration qui cherchent à nous transformer en coupables à n’importe quel prix.
Le mercredi 25 mars 2009, par exemple, le proviseur est venu nous parler parce que nous venions de quitter le cours de Monsieur le professeur qui venait une fois de plus de nous brimer. Le proviseur nous a obligé de retourner en cours et nous a dit devant le professeur que nos « arguments n’étaient pas valables car ils étaient sortis de leur contexte. » Mais y a-t-il un contexte valable pour qu’un professeur parle de la taille de son sexe en classe ? 
Le proviseur nous a dit également, en parlant de nos courriers, que « les élèves d’habitude incapables d’aligner trois mots avaient cette fois produit une œuvre littéraire ». Nous avons maintenu devant lui, tous, notre version des faits et il n’a rien voulu entendre. Aujourd’hui, nous craignons pour notre CCF de maths – c’est la note de maths au Bac Pro (pas d’examen final) et ce contrôle continu est conçu et évalué par le seul enseignant en question (ndlr) – et le proviseur ne prend pas de mesures pour nous protéger. Il continue d’accuser les 5 professeurs de nous avoir « manipulés » et continue de nier le comportement irrespectueux de l’enseignant. Aujourd’hui ce professeur nous rajoute des heures de cours soi-disant pour nous aider alors que nous n’en pouvons plus d’être en sa présence.
Cherche-t-on à nous faire déraper nous aussi quand on nous rajoute deux heures de mathématiques de plus dans la même journée où nous avions déjà trois heures de cours avec lui, ce qui nous amène à cinq heures de cours avec lui dans la journée !
Monsieur le Ministre, pouvez-vous nous aider et faire comprendre que nous ne méritons pas d’être traités comme ça ?
Avec nos remerciements, recevez Monsieur nos salutations très respectueuses.

La classe de Terminale Bac Pro...


Dimanche 22 mars 2009

Des événements très lourds se déroulent ces jours-ci dans un lycée professionnel du Val d’Oise. Etablissement établi dans la banlieue parisienne, il regroupe des adolescents – que des garçons – dans des filières industrielles sans grand avenir. Les taux d’absentéisme y sont prodigieux...

Une altercation entre un assistant d’éducation et un prof vient de faire surgir à la surface de l’institution l’étrange comportement de l’enseignant. La première alerte fut donnée peu avant les vacances de printemps 2009. Des élèves Bac Pro signale à leur prof de français que l’un de leur professeur vient de répondre de manière révoltante à une question de cours.
Interrogé sur la double distributivité par ses élèves, cet enseignant répond : « Je ne connais pas la double distributivité mais je connais la double pénétration ». Il ne l’aurait pas dit à des élèves de Neuilly, murmure-t-on dans la salle des profs. Le proviseur saisi estimera que le terme double pénétration ne suffisait à faire sanctionner l’enseignant.
Précisons qu’un élève, en particulier en banlieue, qui aurait parlé de la sorte en classe aurait été impitoyablement puni et trainé au conseil de discipline (dans lequel d’ailleurs le professeur en question siège en tant que délégué du personnel...) conseil tenu illico presto où l’on aurait fait pleurer sa mère. Est-ce un dérapage malheureux du prof un jour de déprime ?
Il apparaît à la lecture de nombreux témoignages d’élèves – sur lesquels nous reviendrons – qu’il s’agit plutôt d’un comportement systématique de la part du leader enseignant de l’établissement. L’altercation se déclenche tandis qu’un prof de français, recueille ce premier témoignage des élèves en présence d’une CPE.

Au même moment donc, il semblerait que cet enseignant dans les bureaux de la Vie Scolaire provoque un jeune assistant d’éducation. Ce dernier, excédé déjà depuis longtemps par le comportement harcelant de l’enseignant, menace de lui casser la gueule et l’invite à sortir pour se battre. Mais le professeur préfère se rendre à la police et porter plainte contre le surveillant pour menaces de mort.

Conséquence immédiate : l’assistant d’éducation (27 ans) est mis à pied et attend chez lui son licenciement. Ses collègues de la Vie Scolaire écrivent au proviseur une lettre pour le soutenir : «  l’ensemble du personnel Vie Scolaire tient à vous exprimer sa solidarité avec notre collègue dans la situation qui le touche aujourd’hui.
En effet, il a toujours été un très bon élément de notre service, (...) bon médiateur et communique avec une très grande facilité avec nos élèves. (...) efficace, irréprochable, souriant et disponible, sa bonne humeur est communicative. »

Ces salariés, tous précaires, tentent dans ce courrier d’infléchir la décision du proviseur. Les élèves, de leur côté, trois cents inscrits environ, prennent tous le parti du surveillant. Issu comme eux d’une cité de banlieue parisienne, autodidacte après des années de galère, arrivé à la fac de Nanterre par la force du poignet, un modèle pour ces jeunes, est menacé de licenciement à deux mois de ses partiels  : ils l’estiment et le respectent.
Et pour la première fois de l’histoire des banlieues récente on assiste à la mise en place d’une action de solidarité des jeunes en faveur de ce surveillant, non-violente et responsable.

Première étape :
ils rédigent des témoignages à l’adresse du proviseur dont voici quelques extraits :

« Nous, élèves de la Terminale BAC PRO ... , voudrions vous signaler le comportement de notre professeur Untel parce que les évènements se cumulent dans notre classe et nous pensons maintenant que nous devons nous exprimer collectivement à ce propos. Et nous aurions dû vous informer de ça depuis bien longtemps. Et si nous ne l’avons pas fait jusqu’à présent, c’est parce que nous avions peur d’avoir des représailles de Mr Untel. Car il nous menace de nous saboter le CCF ( Contrôle Continu en Formation (ndlr).
Dès le début de l’année, il nous a dit que dès que nous rentrions dans sa classe, nous n’étions plus en démocratie mais en monarchie, et que c’est lui qui fait ses propres lois. Il a même ajouté que dans sa classe, les lois n’étaient pas les mêmes que dans l’ensemble du lycée. Donc dans sa classe, nous vivons un régime particulier. Il se permet régulièrement de nous dénigrer, de nous écraser verbalement et de nous provoquer. Par exemple, un jour, il a dit à E. (un antillais ndlr): « Moi, les noirs, je les appelle pas les noirs, je les appelle les nègres ».  Il a dit à M.A. qui lui demandait « Est-ce que c’est parce que vous n’aimez pas ma tête que vous me virez ? » Mr Untel a répondu : « Oui et dorénavant ce sera comme ça à chaque cours ». Il a dit à T.A. (un jeune maghrébin – ndlr): « Qu’est-ce qu’il y a ? Tu veux qu’on s’embrouille ? ». Très souvent, il nous pousse à la faute parce qu’il prend le plaisir à nous punir. C’est le professeur du lycée qui punit le plus souvent gratuitement et qui même invente des motifs de punitions. Nous aimerions que cette situation cesse parce que le comportement de Mr Untel continue d’être insultant comme nous vous l’avions signalé avant les vacances à propos du fait qu’il nous avait parlé de la « double pénétration » en classe. »
Tous les élèves de la classe signe ce texte.

A la suite de cette classe, une autre, Terminale BEP témoigne à son tour et rédige cette lettre au proviseur : « (...) nous comprenons la réaction de notre surveillant (...) il avait dit d’une surveillante - africaine ndlr – qu’elle avait « un cul grand grand comme un porte-avion » (...) Il avait dit en classe : « Moi Untel j’ai un gros sexe », et dans une équation au tableau il a écrit ma copine est bonne . 2 On a rien dit car on avait peur de lui (...) Ce professeur a dit aussi à B. (un jeune black -ndlr) qui lui avait présenté un travail bâclé : t’as fait un bon travail d’arabe et en regardant les élèves arabes il a rigolé. A deux élèves qui parlaient au fond de la classe, il leur a dit : moi aussi je te nique ta race ». En plus, il fume dans le lycée et à nous il fait des grands discours sur le règlement intérieur. (...) Nous vous demandons de pardonner à notre surveillant et de le garder dans le lycée car nous sommes sûrs que ce professeur l’a provoqué comme il fait toujours. »
Tous les élèves de cette classe signe ce texte.

Des élèves de cette classe écrivent un second texte : «  Il a dit à S.B. (un africain ndlr) qui lui demandait d’arrêter de lui parler comme à un chien, Mr Untel a répondu : «  mais tu es un chien. »
Une autre classe témoigne encore, des secondes Bac Pro, en ces termes notamment : « Monsieur Untel a un comportement provocateur et humiliant, il n’hésite pas à rabaisser les élèves qui n’ont pas compris un exercice (...) Il se permet de parler au féminin aux élèves ayant des cheveux longs (...) Il téléphone et envoie des SMS en cours (...) Tous les élèves de ce groupe signent ce texte.
Aux attestations collectives se joignent des attestations individuelles, comme celle de T.A. : « (....) Récemment, il m’a dit en me provoquant : « est-ce que tu veux qu’on s’embrouille ? » Il voulait que je le tape dans le lycée pour me faire exclure. Et plusieurs fois quand je lui proposais de parler avec lui, il me répondait : « non, on parle pas, dans ma classe c’est une dictature ». Je vous prie d’excuser notre surveillant car Monsieur Untel s’amuse à mettre les gens sous pression. » Comme celle de M. (un africain – ndlr) : « Monsieur le Proviseur, je veux vous dire que je me suis auto-exclu du cours de Monsieur Untel car je n’en pouvais plus de ses provocations ».
Comme celle de la mère de M. qui raconte son entrevue avec l’enseignant dans le bureau du proviseur : « Mon mari et moi avons été amenés à demander un rendez-vous à Monsieur le Proviseur du lycée en raison de la ségrégation pratiquée par Monsieur Untel à l’égard de notre fils (...) - comme on l’a vu dans le courrier de la classe, M. était systématiquement exclu ndlr – A la demande de mon fils qui ne comprenait pas ces exclusions, Monsieur Untel a répondu que sa tête ne lui revenait pas, et qu’il serait exclu des cours quand l’envie lui prendrait (...) En cas d’absence,(mon fils s’était cassé la clavicule au début du premier trimestre) les contrôles ont été systématiquement notés à 0. Les contrôles exécutés les jours de grève des transports étaient rattrapés pour les autres, et notés à 0 pour mon fils (...) il y avait une injustice criante (...) dénoncée par Monsieur le proviseur. Monsieur Untel s’est alors montré méprisant, arrogant et insultant à notre égard. Il s’est permis de quitter le rendez-vous sans un mot à la grande surprise et au grand désaccord du proviseur. »

2ème étape :
tous les élèves du lycée signent la pétition suivante, classe par classe :

« Nous, élèves du lycée... nous soutenons notre surveillant qui risque de perdre son travail à cause de Monsieur Untel. Notre surveillant a toujours eu avec tous les élèves un comportement irréprochable, et ce qui lui arrive est très injuste. »

Le proviseur réagit à ce courrier en reportant une seconde fois sa décision finale ! 3ème étape : Dès lors, ulcérés, le mardi 17 mars, l’ensemble des élèves de ce lycée professionnel après avoir déposé quinze préavis de grève pour la journée en provenance de quinze classes quittent l’établissement dans le plus grand calme, marée humaine pour la justice, sans crier, sans courir, sans parler, ils passent la grille du lycée et rentrent chez eux. Pas de casse. Réaction de l’administration : des coups de fil en masse sont passés aux parents, pour dire à certains: que la grève n’existe pas et que leur fils est sorti seul de la classe... ou que la grève n’est pas légale ou que le stage professionnel sera supprimé en représailles ou que... des mensonges...

Mais les jeunes, pourtant incompris par leurs parents, parfois frappés, ne cèderont pas et malgré la puissante machine mise en œuvre pour pressurer les familles, la grève est un succès total : 95% de participation. Quinze enseignants (sur quarante environ) signent le même jour le texte suivant : « Nous avons assisté aujourd’hui au départ des élèves qui s’étaient mis en grève suite aux menaces de licenciement concernant l’assistant d’éducation.

Depuis plusieurs jours, la tension est très vive dans les rangs des élèves et nous estimons que leur choix de partir et de quitter les lieux était préférable à un climat qui aurait pu dégénérer. »
Réponse du proviseur, affichée dans le hall et dans la salle des profs :
«  Mesdames, Messieurs, notre lycée supporte actuellement un climat délétère lié aux rumeurs de tout ordre qui circulent au sujet d’un professeur de maths-sciences physiques ainsi qu’au mouvement d’humeur de certains élèves (...) Je n’ose penser que nos élèves ont été volontairement manipulés par certains adultes de l’établissement (...) vous devez adopter une attitude d’exemplarité et de discernement face à ce type de situation (...) Nos élèves ont besoin (...) de toute notre attention, de tous nos efforts pour qu’ils puissent travailler sereinement dans un climat propice à leur réussite.»

Le 12 mars, quelques jours auparavant, 19 profs avaient eux-mêmes été l’auteur d’une pétition de soutien au surveillant : « Nous, personnels enseignants du lycée..., souhaitons par cette lettre apporter notre soutien à notre jeune collègue assistant d’éducation. Ce jeune homme a toujours eu envers nous un comportement exemplaire et chaleureux. Par rapport aux élèves nous avons constaté qu’il savait être à leur écoute et qu’il savait régler par son professionnalisme des situations qui auraient pu dégénérer. C’est pourquoi nous vous demandons de bien vouloir étudier avec la bienveillance requise son retour le plus rapide possible, afin que la sanction ne paraisse pas démesurée par rapport aux faits qui lui sont reprochés. »

Le 10 février précédent, une enseignante signale par écrit au proviseur en sortant d’un conseil de classe : «  Je tiens à vous faire part de ces faits qui se sont déroulés lors du conseil de classe de la Terminale Bac PRO (qui avait eu lieu la veille - ndlr) et qui m’ont profondément choqués. Monsieur Untel, une fois encore, s’est distingué par des appréciations sur les bulletins des élèves d’un caractère humiliant, fortement connotées et touchant au droit de la personne (...) » Finalement, le vendredi 20 mars 2009, assisté d’une prof de français, l’assistant d’éducation est reçu dans le bureau du proviseur pour s’entendre signifier la décision définitive. Après un chapitre vantant les mérites du jeune homme, à ses yeux incontestables, ce qu’il avait à plusieurs reprises reconnu maintes fois auprès de différents interlocuteurs, le proviseur du lycée remercie l’assistant d’éducation pour les services rendus et lui transmet de la main à la main une lettre de licenciement : « Au cours de l’entretien préalable en date du 10 mars 2009, je vous ai demandé de vous expliquer sur les agissements dont vous avez été l’auteur, à savoir : menaces de mort à l’encontre de Monsieur Untel (...)Ces faits constituent une faute grave, par votre comportement vous donnez aux élèves un exemple déplorable (...) Je suis contraint de mettre fin à votre contrat de travail, votre attitude rendant impossible la poursuite de votre activité professionnelle au sein de notre établissement. Par la présente, il vous est notifié votre licenciement sans préavis ni indemnité de rupture. »
Le proviseur, qui agitait nerveusement son pied sous le bureau, se montra même très généreux en proposant au surveillant un poste dans un collège à côté (ce qui laisse perplexe : il aurait donc défendu la candidature d’un « menaceur » de mort ??).
Poste, on le savait déjà, de toute façon incompatible avec l’emploi du temps de l’étudiant...

Quant à Monsieur Untel, il est toujours là, fidèle au poste, avec son petit sourire nuisible, hautain, répétant à l’envie : « Je me suis sacrifié pour ce lycée, j’ai tout donné, corps et âme... » Comment les élèves vont-ils réagir en apprenant le licenciement du surveillant ? Les professeurs qui soutenaient le jeune homme vont-ils participer à la grève de protestation prévue pour le lundi 23 mars ?
A suivre...
A l’aide !

Farid Taalba